"Lost Pieces" - les morceaux oublié d'"Exile"
La période allant de 1969 à 1972 est probablement la plus prolifique dans le domaine de l’écriture de nouveaux morceaux par les « Glimmer Twins » Jagger/Richards. Un certain nombre d’entre eux sont définitivement tombés aux oubliettes, certains ont été publiés bien plus tard, parfois plus de 40 années, d’autres sont apparus sur les réseaux sociaux, parfois à l’état d’instrumentaux et ou de démos en particulier sur Youtube, et enfin des chansons se sont retrouvés sur des enregistrements « pirates ». Voici quelques morceaux dont on peut facilement retrouver des traces en épluchant les différentes biographies se rapportant à l’écriture des chansons. Je me suis limité aux chansons qui ont été écrites à Nellcôte ou bien aux « Sunset Sound Studios ». Comme vous le savez probablement, « Exile » puise sa source dans quelques-uns des très nombreux morceaux écrits par les Stones en 1969 et 1970, dont une partie seront publiées par ABKCO sur l’album « Metamorphosis » en 1975, une production d’Andrew Loog Oldham et Jimmy Miller.
Fragile
« Fragile » est une chanson enregistrée par les « Glimmer Twins » à Nellcôte[1], entre juin et octobre 1971 à l’aide du studio mobile. Cet enregistrement n’est pas disponible mais il est officiellement lié aux sessions d’enregistrement d’« Exile » et on y fait référence au travers du projet « Cocksucker Blues » alors que Mick chante une partition contenant « it’s funny ! ». Il semble qu’une partie de la chanson soit même devenue une source d’inspiration pour « Fool To Cry » sortie sur « Black And Blue ». Vous pourrez le tester par vous-même puisqu’une version de la chanson est disponible sur YouTube[2], constituée d’une partition de piano d’un peu plus de 3 minutes jouée soit par Nicky Hopkins, par Ian Stewart ou même par Mick Taylor. Après une minute, le morceau se transforme radicalement en boogie-woogie, puis ralenti et on y entend une voix qui ne semble pas être celle de Mick. Il est possible que cette chanson soit réapparue une année plus tard sous forme d’un duo entre Mick Jagger et Carly Simon, la cassette ayant été retrouvée par Matt Lee, un collectionneur d’objets ayant appartenus aux Rolling Stones. Carly Simon en parle au cours d’un entretien qu’elle a donné au magazine Rolling Stone en 2016[3]. Elle parle d’une balade d’amour lente dans laquelle Jagger et elle semblent assis ensemble au piano en chantant. « Nous avons joué cette impro au piano pendant environ une heure », dit Simon dans l’interview. Elle a également chanté de mémoire une ligne de la chanson, « Drôle, drôle, drôle, drôle, drôle, Comment l’amour peut vous faire pleurer ».
[1] «The Rolling Stones – Complete Recording Sessions 1962-2012 “ – Martin Elliot – 2012 – Cherry Red Books
[2] https://www.youtube.com/watch?v=HmZ1fKsPOnM
[3] « Carly Simon on Trolling Trump With ‘You’re So Vain,’ Lost Mick Jagger Duet” – Rolling Stone – Sarah Grant – 29/11/2016
Separately
« Separately » est un morceau crédité Mick Jagger/ Mick Taylor qui n’a jamais été publié. Initialement enregistré à Nellcôte, Mick Taylor[1] vient d’apprendre à jouer du piano après avoir écouté Nicky Hopkins durant les poses entre les sessions d’enregistrement. Le morceau aurait d’ailleurs du être crédité à Taylor/Hopkins plutôt qu’aux « Glimmer Twins », ….s’il avait été publié. Au départ « Separately » est un morceau instrumental avec Nicky aux claviers et Mick Taylor à la guitare provoquant un peu d’écho. Mick Taylor y rajoutera les paroles et une belle partition de guitare slide. Le morceau est enregistré en 1980 par Mick Taylor pour figurer sur son second album « Special » qui n’est malheureusement jamais sorti[2].
[1] “And on piano…Nicky Hopkins – The extraordinary life of the rock’s greatest session man” – Julian Dawson – Backstage Press – 2011
Exile On Main Street Blues
« Exile On Main Street Blues » enregistrée aux Sunset Sound Studio de Los Angeles est une chanson qui s’est retrouvée sur le flexi-disc[1] promotionnel de six minutes distribué avec l’édition du « New Musical Express » du 29 avril 1972, deux semaines avant la sortie de l’album. On y entend Mick Jagger, accompagné d’un piano, chanter « Exile On Main Street Blues », qui incorpore des paroles improvisées de divers titres de chansons de l’album. Le disque flexible se poursuit avec des extraits de titres tels que « All Down The Line », « Tumbling Dice », « Shine A Light » et « Happy ». L’enregistrement original d’une minute et demie, sans les extraits mais avec plus de paroles, peut être écouté sur le bootleg « Where’s Your Ventilator baby ? ».
Exile - Instrumental
« Exile Instrumental » Un « out-take » qui a émergé en 2011 et qui aurait été trouvé avec un tas d’autres titres de la période « Exile » qui comportaient différentes « coupes » de chansons d’ »Exile » (toutes non disponibles auparavant). La bande avait été donnée à Nicky Hopkins à la fin des sessions de Nellcôte. L’instrumental comporte une guitare slide et un solo typique de Mick Taylor. Il y a un riff solide mais la partition la plus prononcé est une belle mélodie au piano de Nicky Hopkins. D’une durée de sept minutes, c’est une perle rare, perdue depuis longtemps. Mick Taylor a fait remarquer qu’il n’était pas rare que lui, Keith Richards, Jimmy Miller et Nicky Hopkins soient seuls à enregistrer et que de nombreux instrumentaux ont été réalisés de cette façon. Une version en est disponible sur Youtube[1]. La partition de Nicky est tout bonnement superbe.
Les autres titres oubliés
I Don’t Care
« I Don’t Care » est également connu sous le nom de « Sad Song »[1] , enregistré aux Sunset Sounds1 Studios au cours du mixage d’ « Exile » et de la préparation d’un flexi-disc[2] promotionnel pour la revue NME (New Musical Express), sorti le 29 avril 1972 contenant 4 morceaux du futur album « Exile ». Le morceau est une chanson d’amour triste, chantée par Mick Jagger jouant du piano. Cette chanson n’a finalement pas été retenue et n’a jamais été publiée officiellement.
32-20 Blues
« 32-20 Blues », un morceau de Robert Johnson, enregistré par les Stones à Nellcôte. On y entend la partie vocale de Mick, la batterie de Charlie et la guitare.
Torn and Fayed
« Torn And Frayed » : il existe une version de plus de 12 minutes[3] d’un enregistrement très basique réalisé dans les Studios Sumet-Burnet à Dallas, probablement une répétition en vue de leur concert de Fort Worth du 23 juin 1972, dans le cadre de leur tournée américaine.
When You Got a Good Friend
« When You Got a Good Friend” est également un morceau enregistré dans les studios Sumet-Burnet à Dallas en juin 1972[4]. Ce blues a été initialement enregistré par Robert Johnson en 1936 et publié en 1961. Cette chanson a été également enregistrée par Eric Clapton.
Fast Talking, Slow Walking
« Fast Talking, Slow Walking » apparaît pour la première fois en 1971 sous le nom de « Fast Talking » et aurait pu atterrir sur « Tropical Disease », le nom choisi temporairement pour le nouvel album, reflétant ainsi les conditions d’humidité et de chaleur régnant à Nellcôte. « Fast Talking, Slow Walking » sera finalement publié sur l’album non officiel « Place Pigalle vol.4 »[5] en 1995. Le morceau aurait été achevé fin 1972 en Jamaïque, une version de 1973 étant disponible sur YouTube[6] . La chanson aurait finalement été destinée à l’album « Goats Head Soup ». Ce morceau s’est finalement retrouvé sur le CD « lost and found » de la réédition de « Tattoo You » en 2021 à l’occasion du 40è de la sortie de l’album.
[1] https://rollingstonesdata.com/2022/02/04/rolling-stones-unreleased-i-dont-care-1972/
[2] https://www.discogs.com/fr/release/749713-Rolling-Stones-Curved-Air-Fanny-Untitled
[3] https://rollingstonesdata.com/2022/02/02/torn-and-frayed-instrumental-take-1971-unreleased/
[4] https://rollingstonesdata.com/2021/12/12/rolling-stones-unreleased-when-you-got-a-good-friend-1972/
[5] https://www.discogs.com/fr/release/13007657-The-Rolling-Stones-Place-Pigalle-Vol-4