Le Fisc

Le Prince Rupert ( Rupert Ludwig Ferdinand zu Loewenstein-Wertheim-Freudenberg) – le « bon »

Allen Klein – le « méchant »

« Ils devaient partir et ils étaient prêts à imploser. Lorsqu’on est envoyé en exil, on ne peut plus rentrer chez soi ». Ce sentiment se manifeste dans leur musique », raconte Martin Scorsese[1] .

Au printemps 1971, après neuf ans d’existence en tant que l’un des plus grand groupes de rock n’roll du monde, les Rolling Stones apprennent à leur grand désarroi qu’ils sont non seulement fauchés, mais qu’ils doivent aussi quitter l’Angleterre pour éviter de payer l’impôt britannique sur le revenu. Ils décampent sur la Côte d’Azur, décrite avec justesse par Somerset Maugham[2] comme « un endroit ensoleillé pour des gens louches », où toutes les formes de comportements aberrants ont toujours été tolérés tant que la facture était toujours payée à temps. Les Rolling Stones commencent à enregistrer leur nouvel album dans le sous-sol de la Villa Nellcôte, la somptueuse demeure de Keith Richards au bord de la mer. Le résultat est le seul double album des Stones, le classique « Exile on Main Street ».

Les Rolling Stones n’ont toujours pas gagné l’argent qu’ils auraient pu espérer collecter de leurs créations, de la vente de leurs disques ni d’une partie des recettes de leurs nombreux concerts. Leur situation est bien meilleure qu’au début de leurs carrière, lorsque les cachets de leurs premiers concerts étaient loin de couvrir ne fut ce que les coûts de déplacement pour amener la batterie de Charlie sur le lieu du concert, en métro la plupart du temps, ou pour payer les cordes des guitares de Keith. Ils vivaient à cette époque dans un environnement de privation extrême à Edit Grove[3] – un sombrer quartier de Chelsea, à l’époque – leur premier logement londonien.

A cette époque, le petit monde de la production musicale n’en n’est qu’à ses balbutiements. Tant la production que la réalisation de disques ou encore la mise sur pieds de concerts sont organisés de manière très artisanale. Cette situation précaire dure jusqu’au début de l’année 1963, lorsque la bande à Brian Jones se fait repérer par leur premier manager, Andrew Loog Oldham et sa société Impact Sound, une société conjointement gérée avec Eric Easton. En mai 1963, Brian Jones, le seul membre majeur des Stones signe un premier pacte avec le diable Oldham qui devient propriétaire des droits d’auteurs des Rolling Stones, une révolution à l’époque. Cette situation va durer environ 2 années, jusqu’à l’expiration de leur contrat avec la firme disque Decca et avec la société d’Oldham et d’Easton qui tentent d’obtenir de meilleures conditions pour le groupe mais surtout pour eux-mêmes. Dans le journal « Evening News » du 30 mars 1965 on peut lire : « Decca a surenchéri sur l’offre de CBS pour les Stones, ces millionnaires ». Rumeur ou intox ? Intox d’après Bill[4] : « Les Stones millionnaires ! Sur mon compte j’avais 91 £ 2s 4 p ».

Andrew Longham rencontre Allen Klein à Miami, lors de l’assemblée générale de Columbia Records au printemps 1965. Klein est comptable de profession et travaille dans l’industrie musicale new-yorkaise. A la fin de ses études il épouse Betty Rosenblum qui dira de son mari : « lorsqu’Allen veut quelque chose, il est prêt à te vider de ton sang ». Il crée sa propre entreprise Allen Klein and Company qui deviendra plus tard ABKCO Industries. Sa spécialité est d’obtenir des avances considérables auprès des maisons de disques, pour donner à ses musiciens des conditions d’existence bien meilleures, et par la même occasion, de se mettre de l’argent plein les poches. Klein travaille avec des artistes comme Sam Cooke, Bobby Vinton, Dave Clarke Five, the Animals, Donovan et the Kinks et malheureusement aussi plus tard avec les Beatles.

Allen Klein impressionne Andrew et lui propose de devenir son client, de jouer pour lui dans l’ombre, le même rôle de financier sans état d’âme qu’il joue déjà avec d’autres musiciens avec la priorité de démêler les finances des Stones. Oldham donne tous les pouvoir à Klein[5] : « par la présente, je vous autorise à négocier en mon nom comme producteur des Rolling Stones et codirecteur dudit groupe pour un nouvel accord concernant nos enregistrements phonographiques. J’informerai l’autre manager, Eric Easton, et les artistes qui composent les Rolling Stones que vous avez été exclusivement choisi par moi dans ce but. Les requêtes provenant des maisons de disques vous seront adressées ; toutes les négociations et les offres me seront soumises ainsi qu’à mon avocat en Angleterre. Pour vos services et selon l’accord que nous avons conclu, nous convenons de vous payer 20% des sommes brutes garanties, payées ou gagnées dans le cadre des contrats que vous négocierez. Votre rémunération est exclusive et peut-être révoquée par vous ou par moi-même, à condition qu’un préavis d’au moins 90 jours soit déposé par l’une ou l’autre des parties ».

Les Stones ne s’en rendent pas encore compte: ils ont été vendus à Klein, à leur insu. Ils ne savent pas encore que le reste de leur vie sera affectée par cet accord car Klein récupère à son profit, les droits d’auteur sur le groupe. Bill Wyman écrit : « je suis convaincu que, à l’époque Mick et Keith ne connaissaient pas le détail des négociations ».

Néanmoins, Klein améliorera quelque peu les conditions d’existence des Stones en obtenant un contrat plus avantageux pour ses protégés auprès de Decca. Grâce à ses démarches, les Stones reçoivent une importante avance de la part de la compagnie de disques. C’est la première fois qu’un groupe d’artistes pop britanniques reçoit tant d’argent, mais également, c’est la plus grosse somme que Klein ait réussi à soutirer de n’importe quelle firme de disques. Cette avance va permettre aux Rolling Stones de se hisser à un niveau financier qu’aucun groupe, Beatles compris n’a jamais atteint à l’époque. Klein s’empresse de le souligner à la presse. Cette information arrive à l’oreille de Paul McCartney qui ne tarde pas de proposer à Brian Epstein d’engager Klein. Le contrat des Stones bouleverse l’économie de l’industrie du disque : le pouvoir est progressivement en train de passer des mains des patrons des maisons de disque vers celles des artistes. Malgré tout, ni Brian, ni Bill ne se sentent en confiance avec Klein. Bill : « je ne me sentais pas à l’aise avec Klein et cette impression n’a jamais changé ». Keith[6] tempère : « Ne sois pas si mesquin ! Faut bien faire confiance à quelqu’un ! ».

Durant toute la période où Allen s’occupe des Stones, cela reste avec l’espoir que les Beatles s’intéressent à lui. Il n’était pas obsédé que par les Beatles. « Allen Klein était un génie pour faire tourner la pompe à cash…Le seul hic, c’est que tu n’étais pas au courant de la moitié de ce qu’il faisait. C’était une forme de management paternaliste qui ne marcherait plus à présent, mais à l’époque c’était courant », commente Keith Richards.

De son côté, Andrew Loog Oldham devient de plus en plus arrogant envers Mick, s’estimant bien plus important que son protégé ce qui aboutira à sa perte. Drogué, désorienté et subissant une thérapie de choc, Andrew Oldham finit par abandonner la partie contre Klein. En septembre 1967, Les Stones se séparent d’Andrew Oldham : « on s’est séparés parce qu’on était arrivés à un point de saturation mutuelle ». Allen s’est servi des faiblesses d’Andrew pour s’en débarrasser.

Après le départ d’Andrew, Klein s’engage à prendre sérieusement la situation en mains, mais en pratique c’est loin d’être le cas. En juillet 1967, la situation avec Klein ne fait qu’empirer. Si le fisc ne se mêle pas des affaires des Rolling Stones, ce sont les créanciers qui s’en chargent : l’accumulation des impayés ne peut qu’entraîner tôt ou tard une mise en demeure de la société des Rolling Stones.

En octobre 1968, Allen Klein rachète les parts d’Andrew Oldham, un succès majeur dans la carrière de Klein, pour la somme approximative d’1.5m de $. A partir de ce jour, il se paye 50% de tous les droits sur les chansons que les Stones vont produire jusqu’en 1971. « Il nous a fallu un moment pour comprendre qu’Allen Klein nous avait dépouillé pour son propre compte. En Grande-Bretagne, on avait une société appelée Nanker Phelge Music, dont chacun de nous possédait une part. Ensuite, à New York on avait signé un accord pour fonder une société du même nom qui gèrerait tous nos profits.  Nous pensions que c’était juste notre boîte avec une raison sociale américaine, Nanker Phelge USA. Mais après un moment, on a découvert que la société gérée par Klein aux States n’avait aucun rapport avec Nanker Phelge Grande-Bretagne, et qu’elle appartenait entièrement à Klein ! Et tout notre fric partait là-bas ! », raconte Keith Richards dans « Life ». La situation financière nébuleuse perdure jusqu’en 1969, leurs fournisseurs les assignant sans cesse en justice. Bill Wyman rajoute : « Il était terriblement frustrant de devoir mendier de l’argent qui nous appartenait ».

A la suite de plusieurs condamnations par des tribunaux new-yorkais, Mick Jagger se rend compte qu’il doit se débarrasser de Klein au plus vite. Durant les huit années de collaboration avec leurs deux managers successifs, la source principale de revenus pour les Stones ne sera que très maigrement alimentée par le résultat de la vente de disques et des maigres recettes des tournées. Néanmoins, les Stones mèneront un train de vie relativement confortable, sans pour autant devenir des millionnaires. Pour de nombreux aspects, leurs deux managers successifs les gèreront de manière assez similaire et de façon plutôt paternaliste. Les Stones auront l’occasion de s’en plaindre à maintes reprises. Tant Klein qu’Oldham n’ouvriront les robinets financiers qu’avec une extrême parcimonie afin de laisser les Stones assouvir leurs petites folies quotidiennes qui peuvent de temps à autres devenir des caprices de stars comme l’acquisition de voitures prestigieuses. Les Stones commenceront à s’intéresser vraiment à leur argent, et se rendre compte de la situation peu enviable dans laquelle ils se trouvent le jour où leur comptable les assaillira de lettres de rappel du fisc britannique. Le ministère des finances finira bien par avoir raison d’eux. Ils doivent chacun plus de 250.000 £ d’arriérés fiscaux, une somme énorme pour l’époque. Ni eux, ni leurs managers n’avaient même jamais imaginé devoir tant d’argent. Continuer à travailler en habitant la Grande-Bretagne n’est plus une option viable.

Fin 1968 Jagger, ancien étudiant de la « London School of Economics » s’était déjà mis à la recherche d’aide pour résoudre ses problèmes financiers qu’il commençait à anticiper. Mick s’adresse à l’une de ses connaissances, un revendeur d’art et ancien d’Eton, Christopher Gibbs, que les Stones fréquentent régulièrement à Cheyne Walk, l’appartement de Mick à Chelsea. Christopher est un brillant jeune homme de bonne famille également surnommé le « Roi de Chelsea ». Il semble que Christopher Gibbs ne parvienne pas à trouver dans la City quelqu’un qui veuille prendre le temps de s’intéresser aux finances d’un groupe de dégénérés aux cheveux longs. Mais Gibbs dispose d’un étonnant carnet d’adresse qui lui permettra de dénicher un certain prince Rupert Ludwig Ferdinand zu Loewenstein-Wertheim-Freudenberg[7], d’origine bavaroise. Gibbs appelle le Prince Rupert: « pourrais-tu jeter un coup d’œil aux finances de mes amis Mick Jagger et des Rolling Stones ? ». Il lui répond poliment qu’il désire y réfléchir, car il n’a aucune idée de qui ils sont. Son épouse Joséphine lui met sous le nez une ancienne édition du magazine Time, qui aborde les problèmes de drogues qu’ont connus les Rolling Stones l’année précédente. Le Prince se rappelle qu’il a déjà rencontré Mick Jagger lors d’une fête chez un ami à Chelsea, au cours de laquelle les convives étaient complètement défoncées, y compris Mick. Christopher Gibbs reste persuadé que le Prince Rupert, en tant que personnalité mondaine bien connue et organisateur de soirées plaira à Mick même s’il ne connait rien à la musique pop et n’a jamais entendu parler des Rolling Stones. Keith dira à son sujet : « Il n’aimait pas le rock and roll. Il était persuadé que composer de la musique devait automatiquement se passer avec une plume et du papier, comme Mozart ».

Le Prince Rupert est diplômé en histoire médiévale de l’Université Magdalen d’Oxford après avoir passé deux années à Cambridge. Son emploi chez Bache & Co lui permet de vivre la dolce vita à l’italienne lors d’un long séjour professionnel à Rome. De retour à Londres il cherche à acquérir une banque commerciale et jette son dévolu sur Leopold Joseph & Sons Ltd, un établissement qui gère habituellement des clients qui ne sont pas intéressés par les géants de la finance. Il sera secondé par le Baron Alexis de Redé et un groupe d’amis,

Avant de se rendre chez Mick, le prince Rupert se renseigne auprès de ses relations commerciales et de « Chrissie » Gibbs. Celui-ci déclare que le comportement de Mick face à ses fans peut sensiblement contraster avec celui de l’homme intelligent avec ses propres idées, mais qui valent bien la peine d’être entendues. Le Prince fait remarquer lors de sa visite : « les Rolling Stones étaient déjà phénoménaux, mais lorsqu’on s’est rencontré dans la maison de Mick à Chelsea, l’appartement était vide, il n’y avait même pas de meubles, à part quelques objets en provenance du Maroc qui devaient être bien moins chers là-bas qu’ici sur Kings Road ».

Mick déclare d’entrée de jeu : « je n’ai pas d’argent, aucun de nous n’a d’argent ». Etant donné le succès des Rolling Stones, le Prince n’y comprend rien, ce qui explique pourquoi l’appartement à l’air vide. La demande de Mick semble claire : il est à la recherche de quelqu’un qui serait capable de mettre en place une structure permettant aux Rolling Stones de gagner de l’argent. Avant même d’avoir jeté un œil sur les documents financiers du groupe, le Prince prépare habilement le terrain en informant Mick qu’il connait personnellement l’actionnaire principal de la maison de disque CBS ainsi que les banques les plus importantes de Suisse. Après quelques réunions, Mick Jagger commence à pénétrer le cercle intime du Prince : « Mick et moi avons bâtis une bonne relation. Je me suis rendu compte qu’il avait une façon très particulière de s’habiller et que sa personnalité était capable de susciter en moi un certain intérêt à propos d’un milieu qui n’aurait à priori jamais dû m’intéresser. Et même si notre sens de l’humour respectifs étaient assez différents l’un de l’autre, nous nous appréciions mutuellement ». 

En hommage au décès de Brian Jones, les Stones lui dédient le concert gratuit, « The Stones in the Park », à l’occasion du festival de Hyde Park, le 5 juillet 1969. Les Stones y sont tête d’affiche et jouent devant une foule estimée entre 250.000 et 500.000 personnes. Le Prince Rupert participe pour la première fois à un concert de rock. Il est sidéré par la facilité avec laquelle Mick Jagger parvient à manipuler une foule aussi importante. « Pour la première fois j’ai été conscient du pouvoir extraordinaire de la musique des Stones et du charisme de Mick Jagger. J’étais sidéré de sa manière de pouvoir se projeter dans la foule sans avoir d’expérience particulière pour ce type de discipline ». Mais pour le moment rien ne change pour les Stones: ils restent menottés d’une main à Allen Klein et de l’autre à Decca. Le travail du Prince Rupert sera d’évaluer comment en réchapper avec le minimum de dégâts. Il n’est pas question de renégocier le contrat avec Decca, mais purement et simplement de tenter d’en sortir, parce qu’ils n’ont pas le droit de signer avec d’autres compagnies de disques. Decca détient les droits sur des œuvres créées en tout ou en partie, et il y a donc peu de marge de manœuvre. Le contrat avec Decca est tout à fait normal. Ce qui est anormal c’est celui que les Stones ont passé avec Allen Klein. L’objectif à atteindre se résume simplement : l’argent doit revenir à l’artiste et non pas au promoteur.

Après le désastre d’Altamont en décembre 1969, marqué par un assassinat à quelques mètres de la scène, le Prince Rupert s’attaque à l’analyse détaillée de la santé financière et des contrats des Stones. Les documents à analyser lui parviennent par cargaisons entières. Il parvient à obtenir l’aide précieuse des avocats de sa banque puis convoque les membres des Rolling Stones. Il doit insister à plusieurs reprises pour que Keith se présente aux réunions. « Je voyais en Keith – et j’hésite encore à le dire – l’esprit le plus intelligent du groupe. Il avait un certain prestige comme Mick. Les autres membres me faisaient moins impression. Bill Wyman me paraissait tout à fait normal. Au début je croyais qu’il avait certaines facilités pour les aspects financiers et j’aurais souhaité qu’il devienne le scribe financier du groupe, qu’il soit la machine à calculer des Stones afin de faciliter les discussions. J’ai très vite remarqué que ce n’était pas possible. Charlie était différent. Il dégageait un certain charme, un type bien avec du talent pour le jazz et le dessin. Mick Taylor était plus conventionnel », souligne le Prince dans son autobiographie. 

Le Prince se met également à la recherche d’un notaire capable de comprendre le business des Stones, capable d’analyser les contrats et de passer chaque document au peigne fin. A l’issue de cet audit, il commence à comprendre pourquoi les Stones n’ont jamais vu la couleur de leur argent. Celui-ci atterrit dans la poche de Klein qui agit comme une espèce de prêteur vieux jeu, qui garde tout pour lui et qui distribue ce qu’il veut bien leur donner. Allen Klein ne dresse aucun état comptable des transactions. Il ne tient aucun compte des taxes qui sont dues à l’administration des finances. Il faudra plus de 18 mois, jusqu’en 1970 pour décortiquer ce que le Prince Rupert appelle un sacré « trou à rats » de complications et de comprendre tous les aspects de la relation entre les Rolling Stones et Decca, et entre les Rolling Stones et Klein. Les investigations du Prince Rupert mettent à jour une autre réalité encore plus dévastatrice : Allen Klein n’a pas payé un seul penny d’impôt au fisc britannique depuis qu’il s’occupe des Rolling Stones. La supercherie est découverte par l’administration fiscale qui s’est empressée de corriger le tir et de mettre la pression sur la société des Rolling Stones et en exigeant une rectification effectuée en un seul versement. « La plupart des groupes ont cette attitude insouciante à propos de l’argent, que j’ai eu pendant 8 ans. Je ne m’en souciais pas », raconte Mick[8]. « Et aucun manager que j’ai eu ne s’en est jamais inquiété, même s’ils m’ont dit qu’ils allaient s’assurer que mes impôts étaient payés. Donc, après avoir travaillé pendant huit ans, j’ai découvert à la fin que personne ne les payait jamais et que je devais une fortune. Alors j’ai dit : « Et puis merde ». Je vais devoir quitter le pays ».

Le Prince Rupert leur propose une solution radicale : « débarrassez-vous de Klein et quittez le pays ». Il propose au groupe de s’exiler dans le Sud de la France. Il motive son choix par le fait qu’en général les Anglais aiment cette région, et aussi parce qu’il connait lui-même très bien le pays. La France semble être assez appréciée par le groupe : les Stones y ont une expérience positive depuis leurs concerts à l’Olympia, et même si Mick Jagger n’a que Paris en tête, la destination ultime pour le groupe sera le soleil, la bonne cuisine et le vin du sud du pays. Après avoir obtenu le consentement du groupe, il contacte son réseau de connaissance afin de trouver un endroit pour accueillir les Stones et pour négocier le sort fiscal du groupe avec l’administration fiscale française. Il se fait introduire auprès de Me Michard-Pellissier, avocat à la cour d’appel de Paris, un ami personnel du Premier Ministre de l’époque Jacques Chaban-Delmas. L’avocat est réputé pour avoir entre autres défendu Henri Charrière, mieux connu sous le nom de Papillon. Les négociations ont lieu directement avec le préfet du département des Alpes-Maritimes qui propose que les Stones auront à s’acquitter d’un montant qui sera négocié avec les autorités.

Le Prince Rupert poursuit ses investigations à propos du statut fiscal des Stones, afin de trouver une solution à long terme. Ils doivent absolument obtenir le statut de non-résident, s’ils veulent un jour espérer de s’acquitter de leurs impôts indus. Afin d’obtenir ce statut, les Stones ne peuvent pas résider en Grande-Bretagne plus de 90 jours par an, pour une période s’étendant sur 3 années, précédée par une interdiction de mettre le pied sur le sol britannique pendant une année entière. En outre, les Stones ne peuvent plus posséder de bien à leur nom dans le pays. Keith n’a franchement pas envie de se laisser pourrir la vie par les taxes et n’accepte qu’à demi-mot de devenir un non-résident. Par contre dès que ce choix sera fait, il ne le regrettera jamais. Le Prince lui propose de s’exiler sur l’île Moustique. Située à 350 km de Caracas, elle dépend directement de la Barbade et de Saint-Vincent qui appartiennent toutes deux à la couronne de Grande-Bretagne. Cette île offre un statut fiscal très avantageux aux nouveaux résidents. Keith ne semble pas intéressé, au contraire de Mick qui y investi et qui y réside toujours officiellement. Keith commente : « on était dans une situation ridicule. Klein nous prêtait de l’argent que nous n’avions pas les moyens de rembourser parce qu’il n’avait pas payé nos impôts et parce que de toute façon on le claquait ». Keith remerciera plus tard le prince Rupert von Loewenstein : « Et là, je tire mon chapeau à Rupert pour avoir trouvé le moyen de nous sortir de cet endettement colossal ».

Le problème fiscal n’est que très relatif par rapport à la nouvelle qui tombe comme une bombe sur les Stones : le 19 février 1970, ils apprennent qu’Allen Klein détient une copie des originaux des enregistrements mais surtout que c’est lui qui possède les droits de publication des chansons des Rolling Stones. Ils commencent seulement à comprendre qu’ils ont été traités comme de vulgaires marchandises et revendus d’Andrew Oldham à Allen Klein. Tout ce que les Stones ont enregistré dans le cadre de leur contrat avec Decca appartient à Klein. Heureusement, le contrat avec Decca doit expirer en juillet 1970, et les Stones ont décidé de ne plus travailler avec la firme britannique. Il est également probable que le succès immense des Stones de part et d’autre de l’Atlantique attire les grandes maisons de disques qui leur proposeraient des contrats bien plus attractifs, de telle sorte que le million et un quart de dollars proposé par Decca pour resigner un nouveau contrat représenterait leur argent de poche.

Mick gère lui-même les négociations, avec les dirigeants du successeur potentiel de Decca. Il rencontre RCA, EMI et Capitol. Il entre également en contact avec le président du label américain Atlantic, Ahmet Ertegun par l’intermédiaire du prince Rupert. Ertegun travaille déjà avec les groupes Yes et Led Zeppelin. Ertegun proposera au Prince de travailler avec l’avocat qui s’occupe des intérêts de Frank Sinatra, Mickey Rubin, afin de tenter d’accélérer les procédures. Les Stones prennent la décision de produire leurs disques sous leur nouveau label Rolling Stones Records, comme le font les Beatles avec Apple. Leurs disques seront distribués par Atlantic. Le label sera dirigé par Marshall Chess, le neveu des dirigeants de la compagnie Chess Records de Chicago. Le prince Rupert reçoit une offre de 5,7 millions de $ pour la réalisation de 6 albums en 6 ans tandis qu’une offre concurrente de RCA en propose 7 millions. Les Stones pensent qu’ils seront mieux avec Atlantic et mettent en œuvre leur plan initial. Ahmet Ertegun encourage les Stones à finaliser leur prochain album qui sortira sous le nom de « Sticky Fingers » en leur proposant une avance financière qui forcera le Prince Rupert et les avocats à trouver rapidement un compromis avec Decca et avec Allen Klein. Il n’est donc pas surprenant que les avocats des Rolling Stones informent Klein, qu’ABKCO ne sera plus en charge de négocier le futur contrat des Stones et que le Prince Rupert s’occupera dorénavant des intérêts financiers du groupe. Le 30 juillet 1970, un communiqué de presse annonce que les Rolling Stones mettent fin à leurs relations avec Allen Klein.

La firme de disque Decca revient à la charge en mentionnant que des droits d’auteurs leurs reviennent, tant au sujet des œuvres qu’ils ont produites que celles qui sont en chantier mais non achevées, un point délicat qui prend en compte toutes les démos produites par le groupe. Les Stones sont horrifiés : ils sont obligés de communiquer à Decca la liste de toutes les chansons produites mais surtout celles qui sont en chantier. Ce qui signifie pour les Stones, que tout ce qu’ils sont en train d’écrire tombera sous les clauses de l’actuel contrat. Et malheureusement pour les Stones, lors de la sortie de « Exile On Main Street », des employés d’ABKCO semblent reconnaître certaines chansons qui sont similaires à celles qu’ils détiennent sur des bandes préalablement enregistrées mais non publiées. Donc, suivant l’accord contractuel avec ABKCO, Klein serait donc le détenteur des droits de plusieurs chansons de l’album, parce qu’elles qui ont été écrite à l’époque où Jagger et Richards étaient encore sous contrat avec Klein. Il va de soi que les avocats des Stones rejettent la demande d’ABKCO qui finira par obtenir les droits sur cinq chansons de l’album : «Sweet Virginia, », « Loving Cup », « All Down The Line », « Shine A Light » et « Stop Breaking Down ». En plus de la compilation « Hot Rocks » et de deux morceaux de l’album « Sticky Fingers », « Wild Horses » et « Brown Sugar », ABKCO aura le droit de publier « More Hot Rocks » qui sera coproduit par Andrew Oldham.

L’exil des Rolling Stones est annoncé à la presse le 6 février 1971 en même temps que leur dernière tournée. Ils annoncent leur décision de s’exiler en France[9], devenant ainsi les premiers d’une longue lignée de rock stars britanniques à se bannir du royaume. Le communiqué laisse sous-entendre que l’exil des Stones n’a rien à voir avec les impôts et qu’il ne faut voir aucune relation entre le départ des Stones en avril 1971 et le début de la nouvelle année fiscale. L’attaché de presse du groupe, Les Perrin confirme : « il ne s’agit pas d’échapper au fisc. Les Stones sont fous de la France ». La presse n’est pas dupe et annonce de son côté que les Rolling Stones deviennent les premiers exilés fiscaux du rock. D’autres artistes suivront. En guise de représailles, Decca Records8 annonce le 26 février la sortie d’un nouvel album « oldie » des Rolling Stones, qui prendra le nom de « Stone Age ». Les Stones, par voie de presse interposée, annonceront qu’ils n’ont pas été consulté pour la sortie de cet album : « Cet album est d’après nous, en dessous des standards de qualité, autant au niveau du choix de son contenu que de sa couverture ». La communication est signée par les cinq membres des Stones.

Keith a une opinion assez particulière sur cet exil forcé[10] : « Je pense que la raison pour laquelle nous avons été chassés en 70-71 est qu’ils ont réalisé que c’était inutile. Ils montraient leur propre faiblesse. Un pays qui fonctionne depuis mille ans s’inquiétant de deux « Herbert » avec des guitares et un chanteur. C’est là que vous réalisez à quel point notre petite société est fragile. Mais le gouvernement a permis à cette fragilité de se manifester. Ils nous ont laissé regarder sous leurs jupes – ooh, juste une autre chatte. Pour moi, il n’y avait pas le choix, je préférais aller me faire foutre. Pourquoi pas ? Je veux dire, j’aime l’Angleterre et c’est mon pays. Si tu es obligé de rester à l’étranger trop longtemps et que tu y retournes, tu te sens comme D. H. Lawrence. Il a dit : « Je me sens plus étranger là-bas que partout ailleurs. »

Les taxes britanniques élevées et la paranoïa avaient fait pencher la balance. Il était devenu presque impossible pour Richards et Jagger de mettre le pied hors ou dans leur maison sans être harcelés par des policiers avides et souriants. En mars, le groupe devait faire une tournée d’adieu en Grande-Bretagne. Lorsque Gram Parsons arrive de Los Angeles avec sa femme, Gretchen, pour accompagner Richards en tournée, elle a un aperçu de la difficulté qu’éprouve Richards à vivre en Angleterre. Le soir de leur deuxième jour à Cheyne Walk, « nous sommes sortis, nous sommes montés dans la Bentley de Keith, conduite par un chauffeur, et nous n’avions fait que quelques mètres dans la rue quand la police est arrivée », se souvient-elle. « Ils nous ont fouillés et ont essayé de trouver quelque chose sur Keith, mais ils n’ont pas réussi. »

Le prince Rupert profite de cet exil fiscal pour optimiser leurs rentrées financières. Durant les années soixante, sous le gouvernement du premier ministre travailliste Harold Wilson, les revenus annuels excédant les 15.000 £ sont taxés à hauteur de 83% et s’élèvent même à 98% pour les investissements et les soi-disant revenues indirects. « Rupert nous a conseillé de devenir des non-résidents fiscaux, la seule et unique solution si on voulait retomber sur nos pieds financièrement. Quand les autorités nous ont matraqués avec leur super-méga-impôts, je pense qu’ils s’attendaient à tout sauf à ce que l’on dise : OK, on se tire. On va se joindre à tous ceux qui ne vous paient pas ces sommes dingues. Ils n’avaient tout simplement pas prévu le coup. Ce choix nous a hissés plus haut que jamais et a produit « Exile on Main Street »… Rester au pays où on nous laisserait garder en poche, royalement un penny pour chaque sterling qu’on gagnerait ? On n’avait pas envie de se faire dépouiller, alors on a surenchéri et on s’est cassés en France », rajoute Keith. A l’époque le régime fiscal français autorisait les Stones à ne pas payer d’impôts sur ce qu’ils gagnaient à deux conditions : celle de résider au moins une année entière dans le pays et celle de dépenser au moins l’équivalent de 500.000 $ par an ce qui ne représenterait pas une barrière infranchissable pour un groupe comme les Stones ! 

La discussion au sein du groupe peut maintenant se concentrer sur leur déménagement. « Le gouvernement était affolé de voir le nombre de fans qu’on avait » déclare Keith. « Ils ne pouvaient pas ignorer ce que l’on représentait et vers la fin de l’année il a fallu prendre une décision On ne voulait pas s’arrêter, alors on a choisi de partir. On n’avait pas pris racine en Angleterre. On avait voyagé dans le monde entier. Nous étions très conscients d’avoir été mis à la porte par notre propre pays », rajoute-t-il[11]. « Ils essayaient de nous enchaîner et ne pouvaient pas nous mettre en prison, alors ils ont essayé de le faire de manière économique. Cela a pris du temps à digérer »[12]. L’Angleterre était leur maison. La plupart des membres du groupe avaient des maisons de taille décente dans la campagne anglaise, et certains avaient de jeunes familles. L’Amérique était toujours amusante, que ce soit en tournée ou en visite, mais ils étaient toujours heureux de rentrer en Angleterre. C’était la qualité d’étranger, l’étrangeté même de l’Amérique qui rendait les visites si amusantes. Vivre là-bas ou en France était une autre affaire. Mais pour Mick Jagger, qui avait une liaison avec Bianca, basée à Paris, cela semblait être une option attrayante. La France était fermée à l’Angleterre, et une colonie d’exilés anglais y existait déjà, la plupart d’entre eux étant domiciliés sur la Côte d’Azur. D’autre part[13], Mick et sa compagnie avaient d’autres raisons de quitter le pays qui n’étaient pas déshonorantes. Au fond, ils devenaient tous un peu paranoïaques : il y avait eu peu de périodes ces dernières années où l’un ou l’autre n’était pas persécuté. Paradoxalement, la Grande-Bretagne était devenue l’endroit où ils se sentaient le moins bien.

« Le public croyait qu’on n’allait jamais revenir. On menait une vie assez stationnaire pour un groupe. Et on avait des manières très anglaises avec appartement en banlieue et maison de campagne » dit Mick. « Cela nous convenait parfaitement. Je ne dirais pas qu’on était posés. Mais notre vie était stable. Et ce mode de vie qu’on avait adopté et qui était très agréable devait prendre fin.  A l’époque, si un groupe avait du succès en Angleterre et quittait le pays, l’enthousiasme du public retombait, comme un rideau qui se refermait. Et partir à cause de problèmes fiscaux, ça craint. J’ai dû quitter le pays pour payer les impôts que je devais à ce pays ». « Si vous me connaissez », rajoute Mick Jagger[14], «vous savez que je reviendrai plus souvent en Angleterre que je ne l’ai été dans le passé… ». Mais les journaux sont bouleversés[15] par cette annonce, et les gros titres font croire que Mick Jagger, qui avait autrefois été condamné d’un bout à l’autre du pays, était un bon garçon dont le cœur devait rester dans son pays natal. « Je ne vois pas pourquoi ils font tout un plat de ma venue en France » déclare Jagger peu après s’être installé dans sa villa sur la Riviera. « Je n’ai jamais dit que je quittais l’Angleterre pour de bon. Pourquoi ne me laissent-ils pas tranquille ? ».

Après leur déménagement forcé, c’est dans le cadre idyllique de la villa de « Nellcôte » que le prince Rupert rend visite aux Rolling Stones pour continuer à démêler le cas Allen Klein, mais aussi les problèmes avec Andrew Oldham et Éric Easton. Les Stones ont en effet dénoncé devant la Haute Cour de Londres, l’accord secret qu’Oldham a signé dans le dos des Stones avec Decca à propos des pourcentages sur les droits d’auteur et qu’ils considèrent donc comme une injustice. Pour ce qui concerne Allen Klein, les Stones lui réclament la somme de 29 millions de dollars sous le prétexte que celui-ci a échoué dans sa mission de défendre les intérêts financiers du groupe.

Les Stones deviennent de plus en plus agressifs à l’encontre de Klein. Environ un an après avoir coupé les ponts avec lui ils s’en prennent au contrat d’édition d’ABKCO et commencent à se poser des questions sur la validité de l’ancien contrat qu’ils avaient avec Andrew Oldham, un contrat qui a été racheté par Klein. Début février 1972, une réunion est proposée par Allen afin de trouver une solution finale de son contentieux avec les Stones. Mais entretemps Klein fait des déclarations telles que cela ne laisse rien présager de bon : « j’arrive à raisonner comme un voleur ». Les membres du groupe sont même amenés à témoigner devant la cour suprême pour défendre leurs droits. Les avocats des Stones estiment que Klein leur doit environ 29 million de $, peut-être plus.

La situation arrive à son paroxysme lorsque Klein essaie de bloquer la sortie du nouvel album des Stones « Exile on Main Street » obligeant le prince Rupert d’aller s’expliquer avec Klein à New York afin de débloquer la situation. Il prépare méticuleusement son dossier sous le nom de « Introduction au règlement ABKCO/Stones », dans lequel il mentionne : « nous ne sommes pas très loin d’un règlement de l’affaire à condition d’y mettre la pression. Celle-ci pourrait venir directement des Stones et peut-être aussi d’Atlantic, et ce serait dans l’intérêt d’Allen Klein d’accepter, car s’il venait à gagner le procès, il se verrait dans l’obligation de détailler toutes les sources de ses profits ».  Le Prince Rupert met également en garde les Stones qu’une action légale à l’encontre de Klein prendrait plusieurs années à se dénouer et pourrait même les impacter au niveau musical, surtout pour les droits d’auteur des anciennes chansons qu’ils interprètent en public. Les avocats pourraient se débarrasser une fois pour toute de Klein pour un montant estimé à 2 millions de $ qui serait réparti comme suit : 1 million à partager entre Mick et Keith pour les droits d’auteur et 1 million entre tous les membres du groupe et ayant droits. « Les frais de justice allait être divisés en cinq, ce qui est injuste, Charlie et moi finirions avec environ 160.000 $ chacun», déclare Bill. Il décide d’appeler le prince Rupert pour essayer d’obtenir un meilleur compromis et en lui faisant une nouvelle proposition accordant un supplément de 50.000 $ pour Charlie et Bill. Heureusement, la proposition est acceptée.

Le 10 mai 1972, un article de presse est publié afin de mettre fin au désaccord entre les Stones et Allen Klein et ABKCO : « communiqué commun des Rolling Stones, de ABKCO Industries Inc. et d’Allen Klein : les Rolling Stones, ABKCO Industries Inc. Et Allen Klein déclarent que tous leurs désaccords ont été réglés à la satisfaction de chacune des parties. De plus, les Rolling Stones ont joint une plainte contre Eric Easton, à celle d’ABKCO Industries Inc. Et coopèrent avec eux dans cette affaire. Allen Klein et les Rolling Stones veulent qu’il soit clair qu’ABKCO ne travaille plus avec les Rolling Stones…Les procès sont comme les guerres : il n’y a pas de vainqueur ».

[1] “Stones In Exile” – Stephen Kijak – 2010 – Promotone

[2] “Making ‘Exile on Main St. – Rolling Stone – Robert Greenfield – 21/09/2006

[3] “Nankering with the Rolling Stones –James Phelge – Cappella – 1998

[4] « Rolling with The Stones, la saga d’un groupe mythique en 3.000 photos “Bill Wyman – Richard Havers –  2002 – Dorling Kindersley

[5] “Allen Klein: The Man Who Bailed Out the Beatles, Made the Stones, and Transformed Rock & Roll” – Goodman Fred – 2015, Mariner Books

[6] « Life » – Keith Richards, James Fox – 2010 – Robert Laffont

[7] “A Prince Among Stones: That Business With the Rolling Stones and Other Adventures” – Prince Rupert Loewenstein – 2013 – Bloomsbury

[8] “The Rolling Stones – An Illustrated Record” – Roy Carr – New English Library – 1976

[9] « The Rolling Stones Chronicle – The First Four Decades” – Massimo Bonanno – Plexus, London – 1997

[10] « Keith Richards – The Unauthorized Biography” – Victor Bockris – Omnibus Press – 2006

[11] “The Stones Remember Making ‘Exile on Main Street’ in ‘Hitler’s Bunker’” – Rolling Stone – David Wild – 25/05/1997

[12] “Exile On Main St. – The Rolling Stones” – John Perry – Schrimer Books – 1999

[13] “Satisfaction – The Story of Mick Jagger” – John Aldridge – Proteus Books – 1984

[14] « Les Stones – Philip Norman – Robert Laffon – 1984

[15] “Mick Jagger everybody’s Lucifer” – Anthony Scaduto – Berkley Medallion Book – 1974